Les cartes d’identité des Français avant 1940
Les cartes d’identité des Français existent avant leur caractère obligatoire en 1940. Comment en retrouver la trace ? Pourquoi les rechercher ?
La carte d’identité obligatoire
La carte d’identité devient obligatoire par décret du 2 avril 1917 (publié au JO du 7 avril) pour tout étranger devant résider en France plus de quinze jours et âgé plus de quinze ans. La déclaration est à faire dans la première localité de résidence, elle sert de sauf-conduit et doit être visée à l’arrivée et au départ par le maire ou le commissaire de police.
Pour les Français, la carte d’identité ne devient obligatoire qu’en 1940, avec la loi du 27 octobre (publiée au JO le 20 novembre). Tout Français de plus de seize ans doit alors en faire la demande, payer un droit de timbre de 7 francs (sauf exceptions) et la porter en permanence sur eux. Pour celles et ceux qui avaient déjà une carte d’identité, ils peuvent l’échanger gratuitement contre la nouvelle carte en vigueur.

Des cartes d’identité pendant la seconde guerre mondiale
Comme évoqué par la loi, il existe des cartes d’identité avant 1940, mais qui n’ont pas toutes le même formalisme.
Dans les faits, des cartes d'identité préfectorales sont émises dans le cadre de l'article 8 du décret du 8 aout 1935.
Ce décret sur "la circulation des Français et des étrangers, le séjour des étrangers et le régime des passeports en temps de guerre" reste secret et n'est publié qu'en 1939 dans le journal officiel du 8 septembre (pages 11201 à 11212). L'article 8 précise que la carte d'identité est facultative pour les Français et que leur circulation est libre hors zones spéciales.
Avec la déclaration de la guerre, les consignes des préfets sont en adéquation avec ce décret. La carte d'identité est utilisée pour pouvoir contrôler plus facilement les déplacements.
Pour exemple, un arrêté préfectoral (dans un département de zone libre) du 11 septembre 1939 stipule que « les Français peuvent circuler librement dans le département à pied, à cheval en bicyclette, en voiture hippomobile ou en empruntant tous modes de transports publics. Au-delà des limites du département, ceux de plus de quinze ans doivent avaient une carte d’identité et un titre de circulation. Les conducteurs d’auto ou de moto devront avoir un permis spécial. »
Pour
« les limitrophes » qui habitent à proximité d’un autre département, on imagine facilement qu’ils seront les premiers à remplir les dossiers de demande de carte d’identité, afin de pouvoir continuer de fréquenter leurs lieux habituels de commerce, de travail, de vie sociale…

Cette surcharge de travail va amener le même préfet à faire évoluer le régime de circulation :
« Tout Français désireux de se déplacer en zone intérieure peut remplacer la carte d’identité préfectorale par
- Carte délivrée par les maires ou commissariats
- Sauf conduit ou carte de circulation temporaire avec photo
- Passeport périmé depuis moins de 5 ans
- Carte d’identité professionnelle de voyageur de commerce
- Carte frontalière
- Carte d’identité délivrée par les préfectures aux grands mutilés
- Carte de combattant
- Carte ou livret de pension délivré par le ministère des finances ou des pensions
- Carte d’identité des PTT »
On se rend compte qu’il est inutile de perdre du temps à faire refaire des papiers à ceux qui en déjà. Il est à noter qu’il faut cependant que le document ait une photographie.

Avant la seconde guerre mondiale
Le rapport du Maréchal Pétain de 1940 évoque la multitude de moyens en vigueur pour prouver son identité avant la mise en place de la carte d'identité : cartes d’électeur, permis de conduire, commissions administratives, passeports, carte de combattant, livret de famille, livret militaire, extrait d’acte de naissance, carte d’adhésion à des groupements (Société de la Légion d’honneur ou Touring-Club de France), cartes délivrées par les mairies ou commissariats, mais aussi deux enveloppes à son nom (procédure acceptée par les guichets postaux).
Avant la mise en place de ces documents, ce sont deux témoins qui pouvaient permettre de prouver une identité.

Dans le département de la Seine, le préfet de police a mis en place en 1921 un modèle unique de carte d’identité avec des conditions fixes. Dans les autres départements, les cartes peuvent avoir tout format.
Il existe même des cartes d’identité plus anciennes, notamment pendant l’occupation allemande en 1917 (voir le site de Daniel Fornelli Dellaca )
Comment retrouver les traces de ces cartes d’identité ?
Le principe d’une carte d’identité est simple : vous devez rendre l’ancienne pour obtenir la nouvelle.
Cette ancienne carte est soit archivée, soit détruite. C’est le cas de la majorité de ce type de document pour des raisons de confidentialité, pour éviter la fraude et pour des raisons logiques de place.
Si le carte n’est pas conservée, le dossier de demande, lui, a pu être archivé dans les fonds de la préfecture. Laquelle ? Celle de résidence (habituelle ou ponctuelle, par exemple pour les réfugiés) au moment de la demande. Mais si le dossier date d’avant 1940, et comme l’a justement évoqué le maréchal Pétain, celui-ci peut avoir été émis par un commissariat ou une mairie, et c’est donc dans les dépôts de ces archives qu’il faudra chercher le dossier.
Comme pour les cartes d’identité, ces documents peuvent avoir été détruits (aujourd'hui, le dossier est numérisé et on vous le restitue pour que vous le détruisiez vous-même).

Quelles informations trouve-t-on ?
Tout dépend des fonds conservés. Parfois rien, parfois juste un petit cahier listant les enregistrements des demandes (voué en général à pister les paiements du timbre), parfois un document rempli avec les informations à reporter sur la carte (identité, résidence, descriptions physiques, signature, photo), parfois une carte qui n’a pas été réclamée (défaut de paiement, déménagement avant que le dossier ne soit validé par les fonctionnaires…).
Quel intérêt ?
L’intérêt de la carte d’identité n’est pas uniquement lié à la présence d’une photo, permettant de retrouver « un air de famille », en particulier pour les enfants mineurs. Elle est aussi une formidable occasion de trouver une description physique (signes particuliers, taille), notamment pour les femmes dont on ne possède pas l’information de manière systématique contrairement aux hommes. Enfin ces documents peuvent permettre de pister le lieu de vie de populations ayant déménagé pour le travail, pour suivre un conjoint ou pour des raisons de guerre.

© 2025 Généalanille Article publié le 20 janvier 2025
Documents d'illustration : collection C. Cheuret