Avoir dans ses ancêtres un enfant abandonné ne signifie pas qu’il est sans famille. Pourquoi faut-il porter un regard différent sur l’abandon ? Un exemple avec un cas concret.
Les causes d’abandon d’un enfant peuvent être multiples :
Au fil des années les aides financières ou administratives ont tenté de limiter les cas d’abandon, parfois en vain, tout d’abord dans l’intérêt des enfants, mais aussi pour des raisons économiques (gestion des nourrices, visites annuelles, etc.).
Si un orphelin est expressément une personne dont les parents sont décédés, un enfant abandonné (moralement ou physiquement, voire trouvé) a des parents potentiellement vivants, mais pas toujours connus, du moins officiellement. En effet, une femme qui vient d’accoucher peut décider de ne pas reconnaitre son enfant, bien qu’il soit manifeste qu’elle en soit la mère. Pour le père, la filiation est plus difficile à établir, sauf à utiliser un test de paternité.
Voici un exemple réel.
Louise est née à Paris à la fin du XIXe siècle et a été abandonnée par sa mère, originaire d’une autre région. Après son abandon, elle a été placée, comme beaucoup d'enfants, chez une nourrice dans le Morvan où elle a passé une partie de sa vie. De mémoire familiale, elle n’a jamais pu obtenir la copie de son acte de naissance, tant pour se marier, que pour en savoir plus sur ses origines. Elle est décédée depuis, sans savoir.
Ses petits enfants ont fait des recherches généalogiques il y a fort longtemps et repris celles-ci depuis quelques temps. La démarche est aujourd'hui facilitée par les numérisations disponibles en ligne, les multiples indexations et les arbres déposés sur le net… mais l’acte de naissance restait introuvable. Pourtant les preuves de la date de naissace sont visibles par le biais (d’une partie) des archives d’abandon, elles aussi numérisées.
Sollicitée sur le sujet, j’ai pu retrouver l’acte de naissance de Louise en quelques minutes. Et voici la démarche.
La première des démarches a été de vérifier les archives d’abandon : la personne déclarée comme mère, la date d’abandon, la date de naissance de l’enfant et son prénom. Il fallait aussi s’attacher aux autres indices : adresse de la mère, son âge, son métier et sa signature.
La deuxième des démarches a consisté à consulter les indexations disponibles : évidemment aucune trace de Louise, sinon, on ne m’aurait pas sollicitée.
La troisième des démarches évidente était de vérifier le registre des actes de naissance pour la période, le prénom et l’arrondissement, sachant qu’aucun agent d’état civil n’avait trouvé cet acte en un siècle. Bien évidemment, la recherche a été vaine, ce qui était prévisible et rassurant.
La quatrième des démarches a été de contrôler les tables des autres arrondissements, mais pas uniquement sur les naissances, car qui dit enfant naturel (du moins c’est ce que semblait dire les registres d’abandon), il pouvait y avoir un acte de reconnaissance par la mère. Sur ce dernier point, cet acte pouvait être intervenu à n’importe quelle époque et dans n’importe quelle commune. Une reconnaissance aurait pu permettre de trouver l’acte de naissance, son contenu et les mentions marginales. Cette piste n'a pas été fructueuse.
A noter, il manque parfois des noms dans certaines tables, tant annuelles que décennales. La consultation de ces documents n’est qu’une piste à exploiter.
La dernière démarche a été plus payante : en prenant en compte l’adresse de la mère au moment de l’abandon, et en vérifiant l’arrondissement concerné, non pas aujourd’hui mais à l’époque, une nouvelle consultation systématique du registre a été faite. En lisant tous les prénoms à compter de la date de naissance, l’acte de naissance a été facilement retrouvé et il s’est avéré plein de surprises.
Si cette naissance n’avait pas été présente dans cet arrondissement, c’est la technique de l’escargot autour du lieu de naissance qui aurait été privilégiée.
L’acte de naissance retrouvé déclare un enfant né à la date indiquée dans le registre de l’abandon. La mère porte les prénoms, noms, âge, profession et domicile, tous identiques au registre de l’abandon mais ne signe pas l’acte. Par contre, l’accoucheuse précise le nom du père, son âge, profession et domicile. Lui non plus ne signe pas et rien ne dit que les parents de l’enfant sont mariés.
Ainsi, la petite Louise n’est pas enregistrée sous le nom patronymique de sa mère, mais sous celui de son père.
Outre la satisfaction d’avoir trouvé un acte recherché par la famille depuis très longtemps, ce document laisse à penser que la femme qui a abandonné sa famille vivait en couple, marié ou non, ce qu’il faudra vérifier.
Par ailleurs, il va falloir rechercher si on trouve au père un motif d’avoir quitté cette famille : déjà marié, malade, en prison, en cavale, en faillite…
Enfin, les documents d’abandon de Louise indiquait que sa mère était indigente et avait déjà une petite fille de 18 mois. Ayant trouvé un nouveau nom patronymique, peut-être que les indexations disponibles pourront faciliter cette nouvelle démarche… et, qui sait, aider à trouver d’autres enfants.
Un beau cadeau de Noël pour cette famille et plein de recherches généalogiques que je leur laisse faire, car c'est bien cet aspect qui est le plus intéressante quand on s'intéresse à son histoire familiale.
C'est enfin, pour eux, l'occasion de rendre hommage à Louise qui, elle, n'aura jamais rien su de sa famille de sang.
© 2024 Généalanille Article publié le 9 décembre 2024
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