Avez-vous déjà rencontré un curé « blogueur » ? Ce ne peut être le cas que si vous lisez attentivement les registres paroissiaux sans vous arrêter à l’acte concernant votre ancêtre. Que raconte ce curé ? Peut-il vraiment être qualifié de « blogueur » ?
Un « blogueur » crée des articles pour les publier sur internet. Le contenu varie d’une personne à une autre, et n’a pas de directeur de publication autre que l’auteur.
A l’origine, les blogs étaient une forme de journal personnel en ligne avec pour objectifs de donner son avis, raconter son histoire. De nos jours, les objectifs visent plutôt à attirer des visiteurs sur son blog et à « créer du contenu web ».
Dans l’absolu, un curé, comme toute autre personne, peut être, aujourd’hui, « blogueur ».
Quand on construit un arbre généalogique, les archives qui « attirent les visiteurs », ce sont les registres permettant de construire les branches. Ceux d’état civil d’abord, puis en remontant dans le temps, les registres paroissiaux. Et il arrive parfois de croiser un curé qui raconte ses impressions ou ses observations. Les plus connues sont souvent les événements climatiques (tempêtes, inondations…), sociales (peste, disette… ) mais parfois il s’agit d’événements plus rares comme le passage d’une comète.
N’oubliez pas que ces registres n’avaient pas la vocation d’être lus par d’autres personnes que les prêtres. … et les prêtres n’étaient pas censés utiliser les registres officiels comme « journal intime » ! Ils étaient même tenus d’adopter un certain formalisme. Pour cette raison, il est possible que nous n’ayez pas encore rencontré de curé « blogueur ».
Voici l’histoire de Philibert Longin, curé. Il ne parle pas de peste, de tempête, d’incendie, de comète, d’infidélité, … il relatera, assez classiquement, en 1790, la bénédiction de la 4ème cloche.
Même s’il n’est pas un vrai « blogueur », son cas est intéressant.
Originaire de Belleroche dans la Loire, il apparait dans les registres paroissiaux de la commune de Grandris dans le Rhône le 21 novembre 1780. Il signe Longin vicaire de Chenelette, lieu qu’il semble avoir rejoint la même année.
A Grandris, sa signature est d’abord accompagnée de celle du curé, puis il signe seul dès le 24 novembre comme « prêtre commis ». A partir du 4 janvier 1781, il remplace cette formule par celle de « curé ». Il a alors environ 26 ans.
A partir de 1737, les prêtres doivent établir les actes sur deux registres. L’un est conservé dans la paroisse, l’autre est conservé au greffe du tribunal.
Celui que les généalogistes consultent en version numérisée est, selon les départements, celui du greffe ou celui de la paroisse.
Pour la commune de Grandris, les deux registres sont numérisés. Et la différence est flagrante : l’exemplaire conservé au greffe est mieux écrit, du moins plus posément et avec moins de ratures.
L’exemplaire conservé à la paroisse conserve des informations techniques utiles pour le prêtre : tableau récapitulatif en fin de registre, classification du type d’acte en marge (B, M, Ent ou S).
L’exemplaire du greffe contient des annotations en forme de justification :
« il est né deux enfants à Antoine Melet habitant. Je n’ai pu savoir malgré les demandes que j’en ai faites ni ce qu’ils étaient ni où ils avaient été baptisés. »
« Il s’est fait deux baptêmes pendant l’année en mon absence à Lamure qui ne sont point dans ce registre, l’un un enfant de Jean Rivoire, et l’autre » (phrase non terminée).
« si vous voulez qu’on n’écrive pas sur la couverture donnez-nous au moins quinze feuilles de papier ou laissez-nous la liberté de faire nos registres ou augmentés lorsqu’on vous avertis qu’ils sont fini. Comment voulez-vous que dix feuilles suffisent pour 1786 »
L’exemplaire de la paroisse contient des informations, peut-être pour mémoire, ou pour justifier son activité.
Après le décompte des actes, il ajoute « sans ceux qui ont été baptisés dans les paroisses voisines ».
L’année suivante, toujours en fin de registre il rajoute deux baptêmes qui ont été faits à Lamure-sur-Azergues en son absence.
L’année suivante, il précise « Il n’est mort que des grandes personnes dans la paroisse . »
Le père Longin a la particularité d’avoir recensé au moins deux fois la population de son village en comptabilisant les adultes et les enfants : une fois en 1784 et une fois en 1789. C’est un outil exceptionnel, très important pour l’histoire familiale et locale.
Autre élément inscrit dans les registres : les « Dépenses faites pour le transport, reconstructions et réparations du presbytère de Grandris dont je me suis rendu adjudicataire par acte du 24 avril 1785 moyennant le prix et somme de 3719 livres 15 sols » L’ensemble des matériaux est détaillé, ainsi que les dons des paroissiens. Le pauvre curé en est de sa poche « Il m’en coute donc 2487 livres. »
Sur le registre paroissial, il est noté « il manque sur l’année 1791 les actes des 6 premiers mois de l’année », dernière période d’exercice du curé Longé. Cependant, ces actes sont bien conservés sur l’exemplaire du greffe. Les actes de 1785 sont également absents sur le registre paroissial mais conservés sur l’exemplaire du greffe. Il est donc important de consulter les deux exemplaires quand cela est possible.
Philibert Longin écrit dans le registre en 1791 :
« Je soussigné prêtre et curé de Grandris diocèse de Mâcon ayant été instruit que les électeurs du district de Villefranche auraient nommé un autre curé pour lui succéder, déclare qu’ayant été institué curé par l’autorité spirituelle de l’église, cette autorité ne l’ayant pas destitué la prétendue élection est absolument nulle, que je n’ai fait aucune démission en conséquence le prêtre qui prétend me succéder sera absolument sans mission et sans juridiction tous les actes qu’il fera seront frappé de la nullité que l’église a prononcé contre les prêtres qui s’avisent de faire les fonctions sacerdotales et curiales malgré ses défenses et contre toutes ses croix.
Je déclare que je n’ai fait enlever mes meubles du presbytère et ne m’éloigne de la paroisse que par force et sans entendre préjudicier au titre que l’église m’a donnée, je proteste de nouveau de ma soumission à la loi civile pour tous les objets qui se sont point contraire à la religion catholique apostolique et romaine.
A Grandris le samedi veille de la fête de la trinité dix-huit juin mil sept cent quatre-vingt-onze. »
Les biens de Philibert Longin sont inventoriés au titre des émigrés. Il est amnistié pour fait d’émigration par un certificat daté du 20 vendémiaire an XI.
Il deviendra plus tard aumônier de l’hôpital de la Charité à Lyon, ville où il décède en 1837.
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