Il n’existe plus aujourd’hui de langueyeur. Retour sur ce métier disparu : les qualités nécessaires pour l’exercer, les revenus qu’il engendrait, les lieux d’exercice et la cause de disparition.
Un langueyeur est un homme chargé lors d’une transaction d’achat/vente de porcs de vérifier que l’animal n’est pas ladre. C’est à dire qu’il n’est pas atteint de cysticercose, maladie caractérisée par la présence de petits kystes sous la langue.
Pour être langueyeur, il faut être un homme fort et hardi pour être en capacité de retourner un cochon au sol sur le dos, de se mettre parfois à cheval dessus. Avec un bâton, il faut alors maintenir la bouche du cochon ouverte et vérifier le dessous de sa langue. Même le plus gentil des cochons va forcément vouloir bouger et quitter cette position... Quant à son cri, n’en parlons pas !
Faut-il des qualités médicales ? A priori non. Il faut cependant savoir déjouer les vendeurs qui ont préalablement percé les « bulles » sous la langue de l’animal pour faire croire à sa bonne santé !
Outre ces qualités physiques, il faut évidemment être un minimum impartial car cet examen « médical » est réalisé dans le cadre d’un échange commercial entre un vendeur et un acheteur.
Enfin, le langueyeur doit être mobile. En effet, les échanges commerciaux ont rarement lieu au domicile du « vérificateur » mais plutôt sur les foires et marchés, notamment les foires de cochons gras. Il faut donc prévoir de se déplacer parfois loin de son domicile pour exercer ce métier.
Par exemple, en 1850 dans l'Aveyron, si on observe la carte des communes ayant déclaré plus de 1000 porcs, seules certaines zones vont potentiellement accueillir des langueyeurs en dehors des grosses foires.
Au 20ème siècle, un témoin des derniers langueyeurs en Aveyron explique qu’il s’agit « d’un petit boulot. » On peut facilement envisager les langueyeurs comme des « slasheurs », c’est à dire de personnes ayant plusieurs métiers. Car assurément ce travail n’était pas une activité à plein temps !
Agriculteurs, couvreurs, mineurs... comme il ne semble pas nécessiter de compétences médicales particulières pour exercer ce métier, l’activité principale peut être diverse. Ainsi, vous trouvez assez peu de "langueyeur" dans les actes d’état civil, recensements de population, registres matricules, etc.
Comment sont payés les langueyeurs ? Cela dépend des régions, voire même des lieux. Ce service peut être municipal (ce qui permet tout impartialité) ou réglementé par les usages locaux.
Par exemple, en Aveyron, l’acheteur paye quand il s'agit d’un jeune porc. Par contre, pour un porc gras le vendeur paie l'examen sanitaire et l'acheteur le pesage !
A certaines périodes, c’est un revenu complémentaire qui semble attirant. Ainsi, par arrêté municipal du 6 janvier 1875 à Rodez, « considérant que cette profession tend à prendre une extension considérable et est souvent exercée par des individus dépourvus des connaissances spéciales nécessaires, » il est demandé à chaque langueyeur
En 1878, on évoque un tarif de 50 à 60 centimes par langueyage de cochon.
Langueyeur est le mot français. Cependant on le trouve sous des intitulés différents selon les régions : le tombaïre dans l'Aude, le lengaïré à Tarbes, le lenguejaire en Comminges ... En Aveyron, on croise aussi le mot linguétchaïré dans la région d’Entraygues sur Truyère.
L’activité de langueyeur est très ancienne car elle était déjà pratiquée par les Grecs. La corporation a été confirmée par Charles VII sous le nom de visiteurs jurés puis par Henri IV sous le nom de jurés-vendeurs-visiteurs et par Louis XIV sous le nom d’officiers langueyeurs.
« Louis XIV supprima ces offices, puis les rétablit, puis les remplaça en 1704 par des offices de vendeurs-visiteurs de porcs qui furent eux-mêmes remplacés en 1708 par des offices d’inspecteurs-contrôleurs. » (Dict. Hist. des métiers exercés dans Paris depuis le 13e siècle)
La corporation a été supprimée par le décret du 2 mars 1791.
Au 19ème siècle, la loi de 1884 sur les vices rédhibitoires dans les ventes et échanges d'animaux domestiques et l'augmentation du nombre de vétérinaires ont mis à mal cette profession.
Carte postale : collection personnelle
Cet article a été réalisé dans le cadre du challenge UproG de mai 2022 sur le thème imposé "un métier disparu".
© 2022 Généalanille
Article publié le 31 mai 2022
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