Qui est Madame Calvet?

Mme Calvet a eu pour mission d’accompagner des jeunes filles. Mais pas n’importe quelles jeunes filles… des condamnées ! Qui est donc Mme Calvet ?

Une mission particulière

Mme Calvet est chargée à 3 reprises (au moins) d’accompagner des jeunes filles de Rodez à Bordeaux et Toulouse.


Elle doit « surveiller avec exactitude cette enfant pendant le voyage, la traiter avec douceur et pourvoir à tous ses frais de route et de nourriture. »

Les enfants sont toutes de filles et sont mineures (entre 9 et 16 ans). Mais surtout elles sont toutes condamnées par des tribunaux pour avoir agi sans discernement. Elles doivent donc être dirigées sur des établissement d’éducation correctionnelle.


Les « non discernants »

Procule Séguret et Julienne Bousquet ont été condamnées en 1848 pour vol. Elles ont 14 ans et n’ont donc pas la majorité pénale (fixée à 16 ans selon les lois des 25 septembre et 6 octobre 1791). Le juge a décidé pour ces deux jeunes filles qu’elles étaient « non-discernantes », c’est à dire qu’elles avaient agi sans discernement. Elles sont donc acquittées selon l’article 66 du code pénal de 1810. Mais le juge a trois possibilités :

  • Soit de les rendre à leurs parents ;
  • Soit de les confier à une personne, à une institution charitable, ou à l’assistance publique ;
  • Ou bien de les envoyer dans une colonie pénitentiaire.

Pour les deux jeunes, ce sera la colonie à Bordeaux: 2 ans pour Julienne, jusqu’à ses 20 ans pour Procule. On leur y enseignera le métier de couturière et elles ont interdiction de communiquer soit verbalement, soit par écrit avec leur famille.


Les filles sont exemptées de gendarme

Selon l’instruction pour le transfèrement des jeunes détenus du 23 novembre 1848, les filles voyagent avec une femme de confiance. Pour les garçons, c’est un gendarme qui les accompagnent à leur destination.


« Les filles devront toujours être accompagnées par des personnes de leur sexe ; il n’y aura donc jamais lieu, à moins de nécessité absolue, de les confier à la gendarmerie. Autant que possible, vous éviterez de les faire partir en même temps que les garçons ; et, s’il y avait grande économie à les comprendre dans le même voyage, des précautions devraient être prises pour qu’il n’en résultât aucun inconvénient. »


Bien traitées

C’est l’article 18 de l’extrait du marché passé par le ministre le 6 février 1839 pour le transport cellulaire des prisonniers qui donne le détail de la nourriture autorisée. Pour ces deux filles, de 14 ans, « il y est ajouté un peu de vin ».

Le détail est précisé dans l’ordre de transfert :

« La nourriture se composera, savoir :

Le matin, pour le déjeuner, d’un demi kilogramme de pain blanc et de 32 grammes (une once) de fromage ou de charcuterie ou d’un oeuf, au choix de la surveillante.

Le soir, pour le dîner, 1° d’un demi-kilogramme de pain et de 125 grammes (4 onces) de veau, monton, porc ou boeuf, sans os. Il leur sera donné un peu de vin. »

(NB : il n’est pas précisé de 2°).



La procédure

La personne de confiance prend en charge l’enfant dans la prison. Elle veille sur l’enfant pendant le voyage. Arrivée à destination, elle remet entre les mains du préfet l’ordre de conduite qui est visé par le fonctionnaire. Elle rapporte cet ordre de conduite et transmet sa note de frais (elle reçoit une avance).

Pour son trajet à Toulouse, Mme Calvet présentera une note de 64 francs (voiture et nourriture) et recevra une indemnité de 8 francs pour les 4 jours d’absence.


Mme Calvet ne fait pas tous les trajets

Deux voyages à Bordeaux (1849-1852), un à Toulouse (1855), Mme Calvet n’est évidemment pas la seule à faire les trajets pour accompagner les jeunes filles. Pour les colonies de l’Hérault, c’est une sœur couverte qui vient prendre en charge la jeune fille détenue. D’autres personnes de confiance feront probablement les trajets.


Qui est Mme Calvet ?

Marie Anne Arguel est née le 20 mars 1819 à Camboulas. Elle se marie le 29 septembre 1841 à Rodez avec Pierre Calvet. Elle est servante, fille de tisserand. Lui est cantonnier, fils de cultivateur.

Le couple a plusieurs enfants et Mme Calvet décède pendant l’été 1863 à Rodez. Son époux se remarie deux ans plus tard à Catherine Guisard, épicière.

C’est le métier de Mr Calvet qui permet de comprendre pourquoi sa femme deviendra accompagnatrice. De cantonnier en 1841, on le retrouve garde champêtre de Rodez l’année suivante. En 1848, il est sergent de ville ou agent de police. La femme d’un agent de police ne peut qu’inspirer confiance.

Mr Calvet accompagnera lui aussi des garçons « non discernants » pendant sa carrière….


Sources : Bulletin officiel du Ministre de l’intérieur, PER877-AD12, 4E212-32-AD12, 4E212-35-AD12, 4E212-41-AD12, 4E212-44-AD12, Y245 à 260-AD12

© 2019 Généalanille - Article publié le 06 mai 2019

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