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Une femme nommée conseillère municipale en 1941

Dès 1941, une femme pouvait être nommée conseillère municipale. Dans quel contexte ? Voici quelques éléments de réponse.

Conseil municipal

Image d'illustration : une femme au milieu d'une assemblée d'hommes.

Le droit de vote

« Les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes. » Tel est l’article 17 de l’ordonnance du 21 avril 1944 prise par le Gouvernement provisoire de la République française, et signée par le Général de Gaulle.

Elles exerceront leur droit pour la première fois lors des élections municipales d’avril et mai 1945.


Cependant, certaines d’entre elles exerceront des fonctions au sein des conseillers municipaux dès 1941.


La vague des conseillers municipaux

Dès le 26 septembre 1939, un décret prévoit de suspendre les conseillers municipaux :

Art. 3. — En temps de guerre, le conseil municipal d'une commune ou le comité d'un syndicat de communes peut être pour des motifs d'ordre public ou d'intérêt général, suspendu jusqu'à la cessation des hostilités, par décret pris sur la proposition du ministre de l'intérieur.

Deux jours plus tard, le premier décret suspendant l’ensemble des membres du conseil municipal parait au Journal Officiel. Bien d’autres communes suivront.

JO 15 octobre 1939

Journal officiel de la République française 15 octobre 1939 - Suspension du conseil municipal d'Aubin (Aveyron) et nomination d'une délégation spéciale.

Les causes de la déchéance ne sont pas toujours précisées : hostilité au régime, condamnation au correctionnel, désintérêt pour la commune, etc.

Par ailleurs, avec l’invasion allemande, c’est un certain nombre d’élus qui partent en exode sur les routes. Ils sont remplacés par des comités de guerre. Dans certaines communes, ce sont les allemands qui nomment des maires.

La chasse à certaines catégories

La loi du 20 janvier 1940 prévoit la déchéance de tout membre d’une assemblée élective qui fait partie de la Section Française de l’internationale communiste… à moins d’avoir répudié avant le 26 octobre. La chasse aux communistes est lancée et c’est une deuxième vague qui s’abat sur les conseillers municipaux.

Est-il utile de rappeler que les juifs ont également été déchus de leurs postes de conseillers municipaux ?


Le régime de Vichy et les femmes

Le régime de Vichy s’installe le 10 juillet 1940 et quelques mois plus tard, il réorganise les corps municipaux avec la loi du 16 novembre 1940. Celle-ci prévoit que maires et adjoints seront nommés (et plus élus) dans les communes de plus de 2 000 habitants.

Journal officiel de la République française 14 décembre 1940 - Loi réorganisation les conseils municipaux

C’est dans son article 13 qu’apparait la notion de femmes :

La liste de présentation doit être établie avec le double de noms que de conseillers à nomme. Mais surtout les nominations doivent être faites de telle sorte que le conseil municipal compte obligatoirement parmi ses membres :

  • un père de famille nombreuse,
  • un représentant des groupements professionnels de travailleurs,
  • une femme qualifiée pour s’occuper des œuvres privées d’assistance et de bienfaisance nationales.
  • 

L’article 14 précise que les élus doivent avoir 25 ans accomplis. L’article 17 exclue plusieurs membres d’une même famille.

Combien de femmes nommées ?

Pour connaitre le nombre précis de femmes nommées conseillères municipales en mars-avril 1941 dans un département, il faut consulter les archives. Cependant, la théorie laisse à penser qu’il y a au moins une femme par commune de plus de 2000 habitants.

Vous trouverez plus bas, les chiffres pour le département de l'Aveyron.

Comment vérifier ?

Votre famille ou votre commune sont-elles concernées ?

Voici quelques pistes pour vérifier.

1) Évaluer si la commune a plus de 2 001 habitants. Vous pouvez vous baser sur les recensements de population 1936 s’ils sont numérisés, sur les bases disponibles sur le site de l’INSEE (si vous faites une recherche plus globale et pas uniquement de l'histoire familiale ou de l'histoire locale), sur les notices communales du site CASSINI.EHESS.FR, ou via les moteurs de recherche sur internet.

2) En fonction de la taille de la commune, consulter les arrêtés préfectoraux pour les communes entre 2001 et 10000 habitants et les décrets du ministère de l’intérieur pour les communes de plus de 10 000 habitants.

3) Localement, dans les mairies, consulter les délibérations de conseillers municipaux pour la période 1941-1945.

4) Consulter les archives liées au corps électoral (fonds de la préfecture, sous-préfecture, archives municipales déposées).

5) Lire la presse locale.

Les femmes conseillères municipales en Aveyron

En Aveyron, 18 femmes sont devenues conseillères municipales en 1941.


Ont été nommées par le préfet :

  • Aubin : Mme Marie Sahut, épouse du docteur
  • Capdenac Gare : Mme Lucienne Fournier, présidente de la Croix-Rouge
  • Cransac : Mme Jeanne Thomassin, infirmière diplômée d’Etat, ayant fait la guerre 14-18 et la campagne de Syrie en qualité d’infirmière-major.
  • Espalion : Melle Joséphine Batut, trésorière du Comité local de la Croix-Rouge
  • Réquista : Mme Albert Albinet
  • Rieupeyroux : Mme Cayssials, épouse du pharmacien
  • Saint-Affrique : Mme veuve Bernard, née Inquimbert
  • Saint-Geniez d’Olt : Mme Firmi Poujol, déléguée aux œuvres d’assistance
  • Salles Curan : Mme Carles, de Bouloc
  • Sévérac-le-Château : Mme Molinier, présidente de la section de la Croix Rouge
  • Villefranche-de-Rouergue : Mme Pechdo, épouse de l’oculiste

Pour les communes de Firmi, La Salvetat-Peyralès, Villeneuve et Viviez, les arrêtés préfectoraux n'ont pas encore pu être clairement identifiés dans les inventaires des archives (ils ne sont pas présents dans les R.A.A., ni dans plusieurs ressources consultées). Les noms de ces femmes seront précisés après consultation de nouveaux documents d'archives.

 

Ont été nommées par le ministre de l’Intérieur :

  • Decazeville : Mme Juliette Lagarde, sans profession
  • Millau : Melle Madeleine Delmas, vice-présidente de la Croix-Rouge
  • Rodez : Mme Germaine Laville, maman de famille nombreuse


Les femmes électrices et éligibles

Pour rappel, avec l'article 17 de l'ordonnance du 21 avril 1944, portant organisation des pouvoirs publics, les femmes deviennent électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes.

Dans les faits, plusieurs conseils municipaux sont dissous et remplacés par des délégations municipales avec l’aval des comités départementaux de libération. Pour d’autres communes, certains conseillers sont exclus et d’autres rétablis à leurs fonctions.

 

En Aveyron, parmi les nouveaux membres des conseils municipaux ont notera la présence de quelques femmes :

  • Aubin : Mme Rose Lacour née Grèzes (membre provisoire du conseil municipal)
  • Auzits : Mme Paulette Andrieu (membre de la délégation municipale)
  • Balaguier d’Olt : Mme Marie Poirier (membre provisoire du conseil municipal)
  • Capdenac Gare : Mme Marie Palayret et Mme Berthe Lagarrigue (membre provisoire du conseil municipal)
  • Castelmary : Mme Marinette Foulquier (membre de la délégation municipale)
  • Castanet : Mme Marthe Giret (membre de la délégation municipale)
  • Decazeville : Mme Lamy et Mme Goest, présidente des Femmes de Prisonniers (membres provisoires du conseil municipal)
  • Enguialès : Mme Maria Armand (membre provisoire du conseil municipal)
  • Entraygues : Mme veuve Albert Castanié (membre de la délégation municipale)
  • Lacalm : Mme Chardenoux (membre provisoire du conseil municipal)
  • Millau : Mme Alfred Mérié (membre de la délégation municipale)
  • Mur de Barrez : Mme Noël qui remplace provisoirement Firmin Lours, prisonnier de guerre (membre de la délégation municipale)
  • Marcillac : Melle Lacaze (membre provisoire du conseil municipal)
  • Najac : Mme Georgette Fraysse (membre de la délégation municipale)
  • Rodez : Mme Maynadier, docteur en médecine (membre de la délégation municipale)
  • Saint-Geniez d’Olt : Mme Gonon (membre provisoire du conseil municipal)
  • Sauveterre : Mme Maria Frayssinet (membre de la délégation municipale)
  • Villeneuve : Mme Juliette Lavabre née Lacaze    (délégation municipale AP 21/10/1944)
  • Villefranche de Rouergue : Mme Guillon (membre du CM AP 21/09/1944)
  • Villevayre : Mme Raymonde Coursières née Bergougnou (membre du CM AP 09/11/1944)


Votre ancêtre a-t-elle été conseillère municipale ?

Et vous, votre ancêtre a-t-elle été conseillère municipale pendant la seconde guerre mondiale ? Vous avez maintenant ldes pistes pour rechercher.


Photo d'illustration : coll. C. Cheuret
© 2024 Généalanille Article publié le 26 août 2024

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