Quel usage peut-on faire en généalogie du fichier Z destiné à recenser les nord-africains (et notamment les Algériens) à partir de 1957 ?
Le fichage des personnes n’est pas une nouveauté en France, surtout quand il s’agit de surveiller des individus suspects.
En 1886, le général Boulanger est à l’origine de deux outils de fichage :
- le carnet A listant les étrangers en âge de porter les armes
- le carnet B destiné à recenser les personnes soupçonnées d’espionnage.
Le carnet B est modifié au fil du temps (surveillance des antimilitaristes, listage des français représentant « réellement » un danger, surveillance des italiens, puis de tous les étrangers...) jusqu’à son abrogation en juillet 1947. Le carnet B est souvent associé par les chercheurs à la recherche d’anarchistes.
La liste S apparait dans une circulaire diffusée en zone non occupée par le ministre de l’intérieur le 2 juin 1942.
Sont à répertorier dans la liste S les individus considérés comme dangereux pour l’ordre public, les agitateurs ou les propagandistes extrémistes. Les préfets doivent évaluer les individus à noter dans cette liste, qu’ils aient été présents ou non dans l’ancien carnet B.
Selon les consignes, il faut cependant éviter les personnes « seulement » suspectes. En effet, la liste S n’est pas censée être une nouvelle dénomination du carnet B. Elle doit alors ne contenir que les individus dont l’arrestation est indispensable en cas de trouble et, par conséquent, il faut que cette liste soit courte.
Une réforme aura lieu à la fin des années 60 avec la création du Fichier des personnes recherchées (FPR) et dont la fiche « S » (comme sureté de l’état) n’est qu’une catégorie.
Jusqu’en 1957, il n’y a aucun fichier particulier pour les Nord-Africains. S’ils sont considérés dangereux pour la sécurité intérieure, ils sont inscrits classiquement sur la liste S. La circulaire SN/RG/Doc N°27 du 21 juin 1957 prévoit la nécessité d’établir des fiches individuelles pour les individus appartenant aux mouvements nationalistes Nord-africains et autres.
L’idée est simple : créer à l’échelon national un fichier des individus dangereux ou à surveiller résidant en métropole.
Des fiches de renseignements sur les personnes et leurs véhicules sont remplies localement par les services de police ou de gendarmerie puis centralisées à Paris.
Un fichier alphabétique est, par ailleurs, construit sur des fiches de taille 8X11cm de couleur :
- rouge pour les individus très dangereux : agents nationalistes qu’on doit rechercher en priorité ... et interner.
- bleu pour les individus dangereux : les propagandistes actifs par exemple.
- vert pour les individus à surveiller : les diffuseurs de matériel de propagande. Ils ne sont pas considérés comme pouvant créer de très graves troubles.
D’abord réservée à certains départements, la constitution du fichier Z est étendue à tout le territoire à compter du 15 février 1958.
Tous les nord-africains ne sont donc pas concernés : « il n’y a pas lieu d’établir de notices pour les individus insuffisamment identifiés ou sans appartenance politique et sans activité caractérisée. »
Par contre, les déplacements des individus fichés Z doivent être signalés au service départemental des RG et bien sûr à la direction des RG.
Le fichier Z recense les informations suivantes pour la fiche personnelle :
La catégorie (très dangereux-dangereux-à surveiller)
Des informations personnelles : Nom, prénom, alias, date et lieu de naissance, nationalité, nombre d’enfants, l’identité de la conjointe (notamment de l’épouse française métropolitaine), domicile
Des informations professionnelles : profession, nom et adresse de l’employeur
Des informations antérieures : résidences précédentes, date d’arrivée en Métropole, antécédents judiciaires, situation militaire et décorations
Des informations liées au véhicule : marque et N° minéralogique
Des informations politiques : appartenance politique, fonctions ou activités connues dans le parti politique.
Pour les véhicules, les informations sont les suivantes :
N° minéralogique, Marque, N° de moteur, couleur, état du véhicule, propriétaire, utilisateur habituel.
Dès novembre 1958, on voit des fiches cartonnées encore plus détaillées :
Références précises de la carte d’identité, n° d’immatriculation à la Sécurité sociale, Signes particuliers, « sait lire et écrire en français et en arabe (rayer les mentions inutiles) » Contrôlé le ... à... en compagnie de...
Car certains départements en profitent pour se créer un fichier des français musulmans résidant dans le département dès la fin 1958. Fichier qui sera parfois complété de photographies...
La surveillance des nord-africains s’accroit à la fin des années 50.
Dès 1956, et sous prétexte d’étude sociologique ou statistique, on liste les agriculteurs, les commerçants, les employés industriels, l’origine géographique, le lieu de résidence, les raisons de non sédentarisation...
Et pour peu qu’il y ait une analyse sociale, on peut apprendre qui vit « dans une baraque » ou « vend des cacahuètes. » C’est là un des intérêts pour la généalogie !
N’oublions pas que l’Algérie appartenait aux départements français jusqu’en 1962. On ne peut donc pas logiquement chercher les ancêtres algériens dans les fichiers étrangers avant cette date.
Le fichier Z, les listes, le fichier des français musulmans dans un département sont autant de pistes à analyser pour reconstituer l’histoire familiale. Date d’arrivée, lieu (et conditions) de résidence, emploi, moralité, implication politique... les informations sont variées mais parfois peu nombreuses.
Par ailleurs, plus de 9000 algériens ont été assignés à résidence sur le plateau du Larzac en Aveyron. Retrouvez leur trace dans la base de données gratuite.
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Article publié le 7 mars 2022
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