Partons à la recherche des éventuels accidents du travail de vos ancêtres. Qu’est ce qui peut vous mettre la puce à l’oreille pour débuter cette recherche ? Qu’allez-vous trouver dans les archives ? Voici quelques pistes.
Vous êtes vous demandé pourquoi votre ancêtre avait été amputé d’un doigt ou d’une jambe ? N’avez-vous jamais entendu votre grand-père se plaindre des conséquences d’une chute d’échelle ou d’un coup de corne reçu d’un animal ?
Votre grand-mère vous a-t-elle raconté d’où venait sa tache de brûlure ou son mal de dos ?
Votre ancêtre est-il mort hors de son domicile ? A-t-il changé de profession pour devenir mendiant, chiffonnier, a-t-il été obligé de vendre brusquement ses biens ?
Voici quelques raisons de chercher du côté des accidents du travail.
C’est un événement inattendu et imprévisible dans le cadre du travail qui provoque
Les blessures sont diverses : plaies, entorses, explosion, brûlure, chute, coupure, éclat dans l’œil, fracture, amputation, etc.
Les causes vont de la défaillance mécanique, à l’inattention du travailleur, en passant évidemment par l’absence de protection.
L’accident du travail est différent de la maladie professionnelle.
Pour avoir un accident du travail, il faut avoir un travail, salarié ou non, dans l’industrie, l’agriculture, le tertiaire ou tout autre secteur. La législation varie au fil du temps et des métiers exercés.
Les enfants, filles et femmes sont également concernés (et pas uniquement depuis la loi de 1892 règlementant leur travail).
La loi du 9 avril 1898 sur les responsabilités des accidents dont les ouvriers sont victimes dans leur travail va simplifier les démarches sur deux points :
- un mécanisme de déclaration et de prise en charge bien organisé (depuis 1893)
- la possibilité de toucher une rente de dédommagement en fonction de l’incapacité.
Attention, cette loi ne concerne que certaines personnes :
« les ouvriers ou employés occupés dans l’industrie du bâtiment, les usines, manufactures, chantiers, entreprises de transport par terre et eau, de chargement et déchargement, les magasins publics, mines, minières, carrières et exploitation de matières explosives, ou exploitations dans laquelle il est fait usage d’une machine mue par une force autre que celle de l’homme et des animaux. »
Les ouvriers qui travaillent seuls d’ordinaire ne sont pas assujettis à cette loi. Quant aux autres secteurs d’activité, il faudra attendre 1899 pour les exploitations agricoles et 1906 pour toutes les exploitations commerciales.
1) l’employeur déclare l’accident dans les 48H à la mairie puis fourni un certificat médical
2) la mairie prévient le juge de paix et l’inspecteur du travail
3) le juge de paix fait une enquête en nommant si besoin un expert
4) si la victime est décédée ou si le deuxième certificat médical en fin d’arrêt de travail indique une incapacité temporaire ou permanente (partielle ou absolue), le dossier est transmis au tribunal civil de l’arrondissement
5) les parties (victimes ou ayants droits, patron, témoins) sont convoquées au tribunal. Le dossier peut prendre 3 options : le désistement de la victime, la conciliation (comprenez que la victime est d’accord sur le montant de rente qui lui est attribué), la non-conciliation. En cas de non conciliation, un jugement interlocutoire nomme un expert qui rend son rapport avant le jugement définitif.
6) une révision du montant des rentes peut-être fait à la demande de la victime (pour toucher plus), du patron ou de la compagnie d’assurance (pour payer moins).
Bien entendu, tous ces éléments laissent des traces, soit dans des registres, soit dans des dossiers, soit dans l’enregistrement de ces actes.
On trouve dans les archives :
Parfois, il y a un dossier qui contient la quasi-totalité de ces documents.
D’un point de vue plus pragmatique, on a les informations suivantes :
Vous pouvez chercher dans les archives municipales où ces documents sont conservés à des fins historiques. Cependant, la plupart des mairies ne sont pas équipées et organisées à accueillir du public pour des recherches historiques. Pensez-bien à les contacter avant votre venue pour vérifier s’ils ont des archives et sous quelles conditions vous pouvez les consulter. La mairie peut avoir le registre de déclaration des accidents du travail avec les informations de base (date, employeur, victime, causes, blessures, témoins...)
Aux archives départementales, les documents sont à chercher :
Les archives nationales du monde du travail et plus globalement les archives historiques d'institutions, d'administrations, de grandes entreprises (par exemple SNCF, Banque de France, etc.) conservent également des documents sur les accidents du travail.
Enfin, fouillez les tiroirs et le grenier. Vous y trouverez peut-être une déclaration parmi vos papiers familiaux.
Il n’y a pas de table nominative des accidentés du travail, donc la recherche peut être longue si vous ne savez pas la date de l’accident.
Pensez à consulter la presse, les rapports de gendarmerie. Vérifiez le contenu des états statistiques (1860-1880 et à partir de 1883). Soyez vigilant sur le lieu de décès.
Pour rappel, les dossiers d'accidents du travail sont soumis à des délais de communicabilité.
Cet article met en avant la loi de 1898, mais les accidents du travail existaient évidemment bien avant cette date!
C’est l’industrialisation et l’usage d’outils mécaniques qui vont accélérer les modalités d’encadrement de la sécurité au travail.
Citons quelques étapes clés en remontant dans le temps.
Loi du 29 juin 1894 : loi sur la création des caisses de secours et de retraite des ouvriers mineurs. L’exploitant de la mine verse 4% du salaire à une caisse de secours.
Loi du 12 juin 1893 sur la sécurité des travailleurs dans les établissements industriels – article 11 « Tout accident ayant causé une blessure à un ou plusieurs ouvriers, survenu dans un des établissements mentionnés à l'article 1er [manufacture, fabriques, chantiers, ateliers] et au dernier paragraphe de l'article 2, sera l'objet d'une déclaration par le chef d'entreprise ou, à son défaut et en son absence, par son préposé. » NB sont exemptés les établissements où ne sont employés que les membres de la famille sous l’autorité soit du père, soit de la mère, soit du tuteur.
Le décret du 21 avril 1893 fixe les modalités de déclaration : elle est obligatoire pour tout accident semblant devoir entrainer une incapacité de 3 jours au moins. L’industriel doit la faire au maire de la commune de l’entreprise dans les 48 heures suivant l’accident et joindre un certificat du médecin. L’inspecteur du travail est immédiatement prévenu par le maire.
Loi du 2 novembre 1892 sur le travail des enfants, des filles et des femmes dans les établissements industriels – Article 15 « Tout accident ayant occasionné une blessure à un ou plusieurs ouvriers, survenu dans un des établissements mentionnés à l'article premier [usines, manufactures, mines, carrières, chantiers, ateliers de nature publique, privée laïque ou religieuse], sera l'objet d'une déclaration par le chef d'entreprise ou, à son défaut et en son absence, par son préposé. »
Cette loi a pour conséquence la suppression des états trimestriels de 1883 par les préfets via les sous préfets et maires. Ces états sont dorénavant dressés par les inspecteurs du travail.
Circulaires ministérielles des 2 mars et 7 juin 1883 : demande d’un état trimestriel des accidents survenus dans les établissements industriels et agricoles (manufactures, fabriques, usines, moulins, mines, chantiers, ateliers, fermes, etc.)
Circulaire ministérielle du 5 avril 1880 : demande de l’envoi d’un état indiquant les accidents survenus dans les établissements industriels et agricoles lors des vingt dernières années, les causes de ces accidents, les mesures de précaution qui ont été prises pour en prévenir la responsabilité encourue par les propriétaires ou patrons.
Circulaire du ministre du commerce du 30 juin 1860 : le département du commerce doit être tenu au courant des accidents qui se produisent dans les établissements industriels et agricoles. Dans les faits, ce sont surtout les établissements soumis à la surveillance du service des mines qui « jouent le jeu » et encore, certains considèrent des chûtes, asphyxies et éboulements comme « accidents spéciaux » et pas comme accident du travail.
Arrêté du 15 décembre 1848 - Article 3, 4 et 5 Les ouvriers atteints de blessures occasionnées par les travaux seront soignés gratuitement à l’hôpital ou à domicile. Ils recevront la moitié de leur salaire pendant leur interruption de travail. S’ils ne peuvent pas reprendre leur travail, ils auront droit à la moitié de leur salaire pendant un an. MAIS cet arrêté ne concerne que les ouvriers travaillant dans des ateliers de travaux publics non adjugés à des associations d’ouvriers.
L’article 1382 du code civil dit « « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » Mais l’ouvrier blessé ou mortellement atteint n’a droit à une indemnité que s’il démontre que c’est son patron qui a commis une faute.
Dans les faits, avant l’apparition de toute cette règlementation, l’ouvrier travaille un peu « à ses risques et périls ». Il peut demander des secours à l’état (selon certaines conditions) ou faire convoquer son employeur devant la justice pour être dédommagé (ce qui n’est pas fréquent).
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