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La reconnaissance d'un enfant

La reconnaissance d’un enfant par ses parents n’est pas automatique. Pourquoi croise-t-on parfois des actes de reconnaissance dans l’état civil ? Est-ce utile en généalogie ? Des exemples concrets.

Quelques rappels de base : légitimes ou non ?

Pour commencer, il faut expliquer quelques concepts de base.

Le Code civil, dans sa version originale de 1804, reconnait deux types d’enfants :

  • Les enfants légitimes, c’est-à-dire nés d’un couple marié
  • Les enfants illégitimes, c’est-à-dire nés d’un couple non marié.

 

Jusqu’en 1972, le Code civil divise les enfants illégitimes en plusieurs catégories :

  • Les enfants « incestueux » qui ont pour « auteurs » deux personnes dont le mariage est prohibé en raison de leurs liens de parenté ou d’alliance
  • Les enfants « adultérins » qui ont pour auteurs une personne mariée et une non mariée, ou deux personnes mariées mais pas entre elles
  • Les enfants « naturels simples » qui n’appartiennent pas aux deux précédentes catégories (ce peut être les enfants d’une célibataire (ou « fille mère »), d’une veuve (depuis plus de 300 jours), ou abandonné…

 

Couple marié Enfant légitime Pas de reconnaissance
Couple non marié Enfant illégitime "Incestueux" Reconnaissance
"Adultérin"
"Naturel Simple"

Reconnaissance ou légitimation ?

La reconnaissance est l’acte par lequel le déclarant se dit être le parent d’un enfant, et ainsi établit la filiation avec celui-ci.

La légitimation est l’acte par lequel l’enfant passe du statut d’illégitime à celui de légitime, c’est-à-dire de devenir enfant d’un couple marié.

Pour la reconnaissance, comme pour la légitimation, la filiation n’est établie que sur du déclaratif, elle n’est pas la preuve que l’homme est bien le père biologique.

Pas de reconnaissance pour les enfants d'un couple déjà marié

Prenez un registre de naissances d’état civil. Pour la plupart des actes, les enfants sont issus d’un couple marié. Ils sont légitimes et non pas besoin d’être reconnus :

  • Par le père (art 315 du Code civil « l’enfant conçu pendant le mariage a pour père le mari »)
  • Et seulement depuis l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 , l’enfant n’a plus besoin d’être reconnu par la mère (art 311-25 du Code civil « La filiation est établie, à l'égard de la mère, par la désignation de celle-ci dans l'acte de naissance de l'enfant. »)

 

Des exemples où l'enfant n'a pas besoin d'être reconnu

Le couple vit ensemble (du moins officiellement), voire parfois cohabite (Acte N°19 du 16/05/1904 Laguiole – 4E114-13-AD12).  

Le père peut être momentanément absent du domicile conjugal ( Acte N°3 du14/03/1904 Cantoin – 4E47-12-AD12) :

  • parce qu’il travaille ailleurs (Acte N°189 du 02/06/1887 Millau - 4E175-81-AD12), 
  • parce qu’il est mobilisé (Acte N°6 du 07/05/1915 Conques – 4E67-11-AD12),
  • ou parce que la femme est de passage (réfugiée, venue dans sa famille) (Acte N°16 du 29/06/1911 Brommat 4E32-15-AD12)

Le père absent, c’est le grand-père, l’accoucheuse, le secrétaire de mairie ou tout autre personne qui va présenter l’enfant à l’officier d’état civil (Acte N°67 du 06/05/1910 Cransac 4E72-15/AD12). 

 

Si le père est décédé, l’enfant est dit posthume s’il est né dans les 300 jours maximum après le décès de celui-ci (période de viduité) (Acte N°43 du19/03/1915 Villefranche-de-Rouergue 4E300-66-AD12).

Est-ce le vrai père ?

La reconnaissance automatique prévue par le Code civil n’implique pas que le mari soit le « vrai père. » Celui-ci peut d’ailleurs contester la paternité et engager une action en désaveu, s’il sait que l’enfant n’est pas son enfant biologique. (Acte N°264 du 06/11/1915 Rodez - 4E212-66-AD12).

La reconnaissance des enfants illégitimes

Seuls les enfants illégitimes, c’est-à-dire nés d’un couple non marié sont susceptibles d’être reconnus soit par leur mère, soit par leur père, soit par les deux.

Pour rappel, la filiation entre une mère et son enfant n'est pas établie (jusqu'en 2005) sauf si celui-ci a été reconnu.

Une veuve depuis plus de 300 jours, peut avoir un enfant mais celui-ci est considéré comme enfant naturel (Acte 162 du 03/07/1911 Millau - 4E157-105-AD12)  Elle doit alors entamer une procédure de reconnaissance pour prouver la filiation de l’enfant.

Des exemples où l'enfant a besoin d'être reconnu

Sur le délai

La naissance d’un enfant doit être déclarée dans les trois jours au bureau de l’état civil.

Il y a peu d’actes où la mère se déplace dans ce délai. (Acte N°5 du 18/05/1909 Arnac-Sur-Dourdou – 4E8-5-AD12)

La mère doit donc, dès qu’elle le peut, se présenter elle-même à la mairie pour faire la reconnaitre son enfant. L’acte de reconnaissance est établi par acte séparé et ajouté en mention marginale de l’acte de naissance. (Actes 26 et 28 des 2 et 14/12/1908 – Saint-Chély-D’Aubrac- 4E222-13-AD12).

 

Par méconnaissance de la loi, par négligence ou pour toutes autres raisons, l’enfant peut ne pas être reconnu (Acte N°63 du 20/05/1903 Saint-Affrique 4E216-45-AD12), sa filiation n’est donc pas officiellement établie au même titre qu'un enfant abandonné (qui porte parfois un nom patronymique) (Acte 318 du 14/11/1918 Rodez 4E212-67).

Mais à contrario, un enfant abandonné peut retrouver sa filiation suite à la reconnaissance de sa mère (Acte 269 du 01/12/1919 Rodez 4E212-67-AD12)


La reconnaissance peut intervenir rapidement après la naissance, après quelques années (par exemple quand l’enfant va à l’école), ou au moment du mariage de son enfant (Acte N°66 du 02/04/1919 Rodez 4E212-67-AD12)


Qui reconnait

Les deux parents peuvent faire une reconnaissance conjointe dans le même acte (Acte N°17 du 25/12/1900 – Sainte-Eulalie-d’Olt – 4E228-7-AD12).


On rencontre quelques cas de père venant reconnaitre spontanément leur enfant. Il faut noter, que la mère ne peut pas s’opposer à cette reconnaissance.

Le père peut reconnaitre l'enfant après s'est marié avec la mère de celui-ci (Acte N°5 du 09/01/1912 Aubin – 4E12-33-AD12), ou la veille du mariage (acte N°57 du 04/11/1908 Réquista – 4E207/23-AD12 Né à Montpellier, reconnu en Aveyron).


Jusqu'à la loi du 30 décembre 1915, la légitimation des enfants peut avoir lieu au moment du mariage de la mère avec un homme. La mention est alors reportée sur l'acte de naissance.

Après cette loi, si le futur mari veut simplifier les choses, il vaut mieux qu'il fasse une reconnaissance des enfants devant l'officier de l'état civil. C'est pour cela que l'on rencontre parfois les actes de reconnaissance d'une fratrie à une même date (Actes 241 à 243 du 16/12/1918 - Decazeville - 4E77-30-AD12).

L'acte de reconnaissance est alors dissocié de la légitimation au moment du mariage (donc deux mentions marginales) (Acte 80 du 14/10/1917 - Rodez 4E212-67-AD12).


Comment reconnaitre ou légitimer ?

L'enfant peut être reconnu par présentation de l'un des parents à la mairie, mais il peut aussi être reconnu par acte notarié (Acte N°4 Aubin 09/01/1912 4E12-33-AD12), ou suite à un jugement (Acte N°181 du 29/08/1919 Rodez - 4E212-67-AD12)

La reconnaissance peut avoir lieu dans n'importe quelle mairie.

L'enfant est généralement légitimé par le mariage (acte 40 du 08/02/1900 Rodez 4E212-63-AD12) , mais il peut également l'être par jugement (Acte 226 du 30/06/1921 Rodez 4E212-67-AD12).


La reconnaissance ? Utile en généalogie ?

Si on considère que tout acte de reconnaissance ou de légitimation est indiquée en mention marginale, est-ce utile d'aller le consulter ? La réponse est oui :

  • car il peut permettre d'obtenir des informations sur la personne qui reconnait (son âge, son domicile, sa signature) ou moment de l'acte ;
  • dans le cas d'un enfant abandonné, cela indique le nom sous lequel l'enfant est enregistré et ainsi de rechercher un éventuel dossier dans les séries d'archives d'enfants assistés ;
  • parce qu'ils peuvent vous permettre de trouver un enfant né dans un autre département ou dans une autre ville en feuilletant les registres de la commune "de vie" de la mère célibataire ;
  • parce que si un enfant n'a pas été reconnu, il n'héritera pas, donc vous ne le trouverez pas dans la liste des héritiers dans une déclaration de succession.



Soyez curieux !

Quand vous avez une mention d'une reconnaissance ou d'une légitimation allez systématiquement voir l'acte cité.

Quand vous avez un acte de reconnaissance ou l'information d'une légitimation dans un acte de mariage, allez voir l'acte de naissance.


Si vous faites de la généalogie, n'utilisez pas uniquement les archives indexées, mais lisez bien les tables des registres et regardez les enfants ciblés E.N (enfant naturel) et les reconnaissances. Vous y retrouverez peut-être d'autres cousins. Pensez bien à regarder au nom de jeune fille. N'oubliez pas de consulter les recensements de population, l'enfant y apparait peut être auprès de sa mère, même si celle-ci ne l'a pas officiellement reconnu.



© 2022 Généalanille
Article publié le 30 novembre 2022
Cet article a été réalisé dans le cadre du challenge UproG de novembre 2022 sur le thème imposé "un enfant reconnu".

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