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Les enfants moralement abandonnés

Le statut des enfants moralement abandonnés est défini dans la loi du 24 juillet 1889. Cette nouvelle catégorie d’enfants assistés s’inscrit dans la protection de l’enfance face à des parents indignes ou devenus incapables de diriger et surveiller leur progéniture. Vos ancêtres sont-ils concernés ? Comment retrouver la trace de ces familles ?

Avant la loi de 1889

Avant 1889, c’est le décret du 19 janvier 1811 qui régit les enfants trouvés, abandonnés et les orphelins pauvres. Le titre IV du décret précise que les enfants sont en nourrice jusqu’à 6 ans, puis placés en pension chez des cultivateurs ou des artisans, sauf les estropiés et les infirmes qui resteront à l’hospice pour travailler dans des ateliers.

A partir de 12 ans, les garçons sont mis à la disposition de la Marine, et s’ils n’y sont pas requis, ils partiront en apprentissage chez des laboureurs ou des artisans. Au même âge, les filles seront placées en apprentissage chez des ménagères, des couturières, ou autres ouvrières, ou dans les fabriques ou manufactures. (Article 17).


Pour les enfants maltraités, ceux incités à la débauche (vol, prostitution), ceux délaissés par leurs parents, ils sont considérés alors soit comme abandonnés, soit comme délinquants (selon s’ils ont plus ou moins de 12 ans).

La loi du 24 juillet 1889

La loi du 24 juillet 1889, parue le lendemain au journal officiel, est destinée à la protection des enfants maltraités ou moralement abandonnée.

Elle est divisée en deux titres principaux qui précisent les cas de déchéance et les modalités de mise en place de la tutelle des enfants.


Le premier titre précise les cas où la déchéance paternelle est prononcée « de droit » envers les parents, par exemple :

  • S’ils sont condamnés, soit comme auteurs, co-auteurs ou complices d’un crime commis sur la personne d’un ou plusieurs de leurs enfants, soit comme co-auteurs ou complices d’un crime commis par un ou plusieurs de leurs enfants.
  • S’ils sont condamnés deux fois comme auteurs, co-auteurs ou complices d’un délit commis sur la personne d’un ou plusieurs de leurs enfants .
  • S’ils sont condamnés deux fois pour excitation habituelle de mineurs à la débauche…

 

Mais on trouve également les cas où la déchéance paternelle « peut » être prononcée, par exemple :

  • Les père et mère condamnés aux travaux forcés à perpétuité ou à temps, ou à la réclusion comme auteurs, co-auteurs ou complices d'un crime autre que ceux prévus par les articles 86 à 101 du code pénal;
  • Les père et mère condamnés deux fois pour un des faits suivants : séquestration, suppression, exposition ou abandon d’enfants ou pour vagabondage
  • Les père et mère condamnés une première fois pour excitation habituelle de mineurs à la débauche…

 

 

Pour le deuxième titre, la situation est différente. Quand les parents ne sont plus en état de surveiller et de diriger leurs enfants, la loi prévoit la possibilité de transférer leurs droits à l’assistance publique en état dessaisis de la puissance paternelle.

Un nouveau sigle dans les registres et dossiers

A partir de la loi de 1889, outre les Tr (Trouvés) , Ab (Abandonnés) illégaux ou légaux, les Or ou Orph (Orphelins), on voit apparaitre les sigles MALTI et MALTII selon si l’enfant est moralement abandonné au titre I ou II de la loi de 1889.


Moralement abandonné suite à jugement

Pour retrouver la trace d’un enfant moralement abandonné, il faut garder à l’esprit que la déchéance, au titre I comme au titre II, fait suite à un jugement. A défaut d’avoir accès au casier judiciaire de votre ancêtre, voire aux répertoires de condamnation, souvent non numérisés, il peut être intéressant de consulter la presse numérisée pour pister une éventuelle condamnation pour l’un des motifs prévus par la loi de 1889.


Tous les enfants de la fratrie

Si les parents ne sont pas capables d’élever leurs enfants, le juge prononcera une déchéance pour l’ensemble de la fratrie. C’est un élément à prendre en compte pour votre recherche. Tous les enfants seront placés à l’assistance en même temps, mais pas forcément dans la même famille.


Le droit à reprendre l'enfant pour le titre II

L’incapacité à surveiller ou diriger ses enfants peut être provisoire. Cela peut-être dû à une hospitalisation, à un déplacement professionnel de longue durée, à une situation économique difficile, à l’absence. Certains parents (ou ascendants) pourront venir rechercher leurs enfants quand la situation se rétablit. C’est le cas de François qui est remis à sa mère en 1944 (le père était prisonnier de guerre, la mère était réfugiée).

 

Des exemples de familles concernées par la loi.

Jean, devenu veuf, se trouve dans l’impossibilité de subvenir seul à l’éducation de ses deux enfants mineurs. Il propose de payer 10 francs par mois pour les deux enfants jusqu’à leurs 13 ans. En échange, il abandonne sans réserve l’ensemble de ses droits de puissance paternelle à l’égard de ses enfants mineurs et délègue ses droits à l’assistance publique.

 

Auguste vit avec son père. Sa mère a quitté le domicile conjugal depuis longtemps. Le père refuse de subvenir à l’entretien et à l’éducation de son fils. L’enfant est placé à l’assistance publique comme moralement abandonné.


Jean Louis est condamné à 3 mois de prison pour violences volontaires sur sa femme et ses filles. Il a porté des coups et privé d’aliments les 4 autres enfants de moins de 15 ans.

Il est déchu de sa puissance paternelle pour les 6 enfants. Sa femme, ivrogne, est déchue pour les 4 petits qui sont placés à l’assistance publique.

 

Pour vos ancêtres

Vous avez perdu vos ancêtres pendant leur enfance, il est possible qu’ils puissent avoir été moralement abandonnés. Il vous faut chercher des pistes du côté des séries X (Assistance et prévoyance), U (justice) et comme évoqué précédemment la presse.

Ne jugez pas négativement vos ancêtres, des « accidents de la vie » peuvent avoir provoqué cet abandon.



Illustrations : collection personnelle
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