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Epidémie à l’orphelinat

Une épidémie typhoïde survient à l’orphelinat de Grèzes à Séverac l’Eglise (12) au moins de novembre 1892. Elle dura 4 mois et fit 5 morts dont 1 orphelin et 4 religieuses.

La fièvre typhoïde arrive à l’orphelinat

L’épidémie de fièvre typhoïde a fait son apparition en juillet 1892 à Lissirou puis en août à Gaillac d’Aveyron. Pendant deux mois, elle va faire des ravages dans ces communes avant d’atteindre l’orphelinat de Grèzes situé à Séverac l’Eglise. La méthode de transmission est inconnue.

L’orphelinat de Grèzes est tenu par des sœurs et accueille de jeunes garçons âgés de 2 à 10 ans et les garde jusqu’à 18 ou 20 ans.

L’épidémie commence le 1 er novembre 1892 par une religieuse novice de 18 ans qui souffre d’ une fièvre aux allures bénignes .

Seules les sœurs sont touchées…

Au 22 décembre, on dénombre 20 nouveaux cas. Mais ce sont uniquement des religieuses qui sont atteintes . Dans la même semaine, 4 autres sœurs sont finalement touchées par la maladie.

Deux sœurs viennent de décéder à l’orphelinat : une novice de 18 ans, Joséphine Lacan et une professe de 42 ans, Marie Catherine Soulié.

Parmi la communauté religieuse, on dénombre :

  • 1 cas très grave chez une sœur de 20 ans
  • 1 cas grave chez une religieuse démoniaque de 22 ans
  • 5 cas légers sur des religieuses de 16 à 26 ans
  • 3 cas très légers sur des novices de 15, 17 et 19 ans.


La religieuse très atteinte meurt le 28 décembre. Il s’agit de Marie Maurel. On notera également le décès de Mélanie Trébosc le 20 décembre 1892 à Bédarieux (34), deux jours après son départ de Grèzes.

Quand à la sœur démoniaque, elle restera bien vivante et son comportement sera évoqué dans la presse 10 ans plus tard.

… ou presque

Le rapport du Dr Géraud indique que l’orphelinat a été touché dès la fin aout et notamment par le biais d’un jeune garçon de 13 ans et d’une religieuse de 23 ans. Le garçon « languinait » et ne retrouvait pas ses forces.

A partir de novembre, le nombre de malades augmente. Fin décembre, on s’accorde à dire que 15 enfants de moins de 14 ans sont atteints . D’ailleurs, on enterre Henri Georges, orphelin originaire de Paris, le 2 janvier 1893.

Les chiffres s’affolent et montent jusqu’à 45 cas recensés sur la centaine d’habitants théoriques de l’établissement.

Les valides soignent les infectés

5 religieuses et un orphelin de 15 ans sont traités à Rodez. Pour les autres, ce sont certaines sœurs valides aidées du Dr Séguret de Laissac, médecin de l’établissement qui font au mieux.

Parmi les symptômes et outres la fièvre, on note beaucoup de troubles nerveux, de délires nocturnes… Et pas question de renvoyer les enfants chez eux, ils sont tous orphelins !

Une étude sur les lieux

Une étude est faite par le Dr Géraud. Il est ressort les éléments suivants.

L’orphelinat est situé sur la rive gauche de l’Aveyron, à 3 km environ du cours d’eau.

Il est composé au nord d’une maison (en A) à 2 étages à 3 fenêtres de façade avec au rez de chaussée un réduit à porcs. On accède au 1 er étage par un escalier à double rampe qui est occupé par les bureaux et deux chambres. L’étage au dessus sert de dortoir aux orphelins.

Le bâtiment B comprend 2 étages et un rez de chaussée qui sert de réfectoire, le reste est en dortoirs.

Un hangar et d’une écurie composent le bâtiment C.

 

Face à ces constructions, et séparées par une cour, se trouvent les latrines pour les orphelins et le personnel agricole (en F). Il s’agit d’une série de 5 cabines étroites avec un orifice de chute creusé dans une dalle d’ardoise. En sous sol, une fosse fixe est cimentée. La vidange est faite à main d’homme à époques régulières.

En G, une longue étable surmontée d’une grange fait face à une longue fosse à fumier.

 

En E-H, un établissement est réservé à la communauté chargée de la direction de l’orphelinat. Le dortoir des religieuses occupe les 2 étages du bâtiment E dont le rez de chaussée est réservé à la chapelle commune. Les étages de H sont affectés aux différents services. Sous la rampe d’escalier, on trouve une porcherie.

Les latrines des sœurs sont en J mais elles s’évacuent via un puisard en S.

 

L’orphelinat s’alimente en eau de boisson à la fontaine publique de Séverac l’église. La source qui fournit la fontaine provient de la montagne voisine. Un service d’approvisionnement d’eau est fait chaque jour par un volumineux baquet trainé à bras par les garçons de ferme. Ils remplissent le tonneau au robinet.

En G une citerne est annexée au bâtiment et recueille l’eau de pluie. Plusieurs puits existent mais ne sont utilisés que pour le jardinage.

Des mauvaises conditions et habitudes

Le constat est clair. Les conditions d’hygiène ne sont pas bonnes. Les matières fécales des malades censées être enfouies dans une fosse à quelques centaines de mètres du hameau et recouvertes de chaux ont été déversées dans les latrines de la communauté… d’où une probable propagation de la fièvre !

Il faut désinfecter !

Pas besoin d’enlever tapis, tentures et rideaux, il n’y en a pas. Par conséquent, il faut désinfecter ce qui existe. Cuillers, tasses, verres et autres vaisselles sont dorénavant plongées dans l’eau bouillante.

On projette sur les planchers de la sciure de bois humectée avec du sulfate de cuivre, puis on balaye et on brûle la poussière.

L’eau de la citerne devient interdite. La fosse à fumier est vidée, nettoyée, désinfectée.

Les officiels et la technique

Par ailleurs, le Dr Séguret fait au mieux pour enrayer l’épidémie. Mais, d’après la presse, il ne prévient la préfecture que fin décembre.Tout va alors s’accélérer.

La commission d’hygiène se déplace à Grèzes fin décembre ou début janvier 1893 (selon les sources). On voit à l’orphelinat le Dr Bompaire de Millau (inspecteur des épidémies), le Dr Thoinet, du conseil d’hygiène central, délégué par le ministre de l’intérieur, Mr Carré, secrétaire général de la préfecture, mais aussi l’Evêque qui vient apporter son soutien aux religieuses.

 Un secours de 5000 francs est accordé par le gouvernement et des machines à vapeur de la maison Geneste et Herscher de Paris sont expédiées dans l’Aveyron. Elles seront utilisées pendant tout le mois de janvier pour désinfecter objets et vêtements.

L’épidémie est jugulée

Grâce aux mesures prises, à la fin des labours, à l’arrivée des pluies et de la neige, l’épidémie se termine dans le mois de février avec 4 décès dans l’Aveyron.

Le Dr Géraud rédige son rapport en juin 1893. Il reçoit alors une médaille de bronze du ministre de l’intérieur pour son travail.

Finalement, Mr Séguret et Mr Bompaire seront également récompensés. En effet, ils obtiendront les médailles de bronze des épidémies par arrêté ministériel du 25 mars 1893.

 

Les bâtiments de l’orphelinat abritent aujourd’hui un ITEP.

Sources: 4E276/8-AD12, 4E276/9-AD12, 5Mi70/13-AD34, 1M939-AD12, 5M20-AD12, La France charitable et prévoyante, l’écho du merveilleux et Désinfection, stérilisation, renseignements pratiques sur les appareils et procédés, par Fernand Dehaître numérisés par gallica, carte postale collection personnelle.

Cet article a été réalisé dans le cadre du challenge UproG d’octobre 2017 sur le thème imposé “les épidémies”.

© 2017 Généalanille - Article publié le 27 octobre 2017

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